CHEMINS D’ECRITURE (AUX ORIGINES DU PROJET)
Comment faire un enfant dans un monde dont on nous prédit l’effondrement ?
Tout est parti de là.
Une question fondamentale pour moi et, je l’ai découvert ensuite, pour beaucoup d’autres jeunes femmes de mon âge avec lesquelles j’ai échangé au cours de mon écriture. Une question qui grandit, gagne du terrain, s’installe. Et qui commence même à apparaître dans les médias qui notent l’apparition des Ginks, « Green Inclination No Kids »[1].
Une question capitale mais à laquelle je ne parvenais pas à répondre.
J’ai donc choisi de mettre en scène une femme, Meth et de lui faire bercer son jeune enfant dans un monde « d’après » l’effondrement.
Avec ces deux personnages, j’ai exploré mon questionnement initial. Quel sens donner à la vie de cet enfant dans un tel monde ? Comment assumer face à cet enfant, la responsabilité d’appartenir à une génération avertie des menaces pesant sur l’environnement mais qui n’a pas réussi à les écarter ?
La situation est simple. Meth raconte une histoire à son fils pour l’endormir. Cette histoire est celle de la Terre. De ses origines à son irrémédiable détérioration par l’activité humaine.
J’ai construit ce récit sur deux temporalités qui se répondent l’une l’autre. Le temps présent d’abord. Temps post-effondrement dans lequel Meth évolue et nous raconte son histoire. Pour évoquer la Terre, elle a alors recours à des récits mythologiques et des textes poétiques de toutes époques extraits des œuvres de Jean Giono, Charles Péguy, Ronsard, etc.
Le passé ensuite qui nous est restitué grâce à plusieurs flash-backs. Grâce à eux, on apprend que Meth est une entomologiste autrefois engagée pour la préservation de l’environnement.
Cette structure en deux temps permet d’une part de dynamiser l’histoire de Meth et d’autre part de densifier l’histoire de la Terre car la planète est présentée à la fois dans sa dimension poétique et dans son existence scientifique.
Raconter la Terre est une histoire passionnante qui pourrait suffire à elle seule à bâtir un spectacle mais je voulais aller plus loin et ne jamais perdre de vue la question qui motivait ce récit et ma démarche d’écriture. Que transmettre à un enfant dans un monde post-effondrement ? Autrement dit, dans un monde que l’on imagine désespéré, comment renouer avec l’espérance, élément essentiel à une vie qui commence ? Plus l’histoire avance, plus l’héroïne aussi avance de réponses à cette question et renoue avec cette espérance essentielle.
Mon chemin d’écriture avait commencé par une question qui m’inscrivait dans l’immobilité, la difficulté -voire l’impossibilité- de prolonger la vie, le refus du mouvement. Au fil du processus d’écriture et main dans la main avec le personnage de Meth, je me suis affranchie de cet immobilisme et j’ai retrouvé l’espérance. Non pas ce simple espoir béat, immobile lui aussi, que « ça ira mieux demain » -car nous savons que sans une action vigoureuse, rien ne changera- mais une espérance en mouvement apte à porter des engagements. En un mot, du courage pour affronter les défis qui se présentent à nous, et peut-être même pour faire en sorte d’échapper à ce monde d’après.
Ce faisant, en plus d’apporter des réponses possibles à ma question première, la pièce souhaite également partager cet espoir et cette énergie retrouvés avec ceux qui doutent encore du bien-fondé et de l’utilité des combats écologiques
[1] https://www.marieclaire.fr/,ginks-ne-pas-avoir-d-enfant,20258,432573.asp
https://www.consoglobe.com/ces-ginks-qui-refusent-les-enfants-cg